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2 janvier 2021

Episode 17 - Merle a du chien

Dix-septième question : "Ils vont vraiment les abattre ?" 
Voyez plutôt... et retrouvez les autres contributions à l'atelier FEUILLETON proposé par AnnickSB, PAR ICI !


Episode 17 - Merle a du chien

--Paris, IIème arr. Hôtel Grangier--

Devant les portes nacrées de l’ascenseur menant aux étages réservés de l’Hôtel Grangier, le lieutenant Robert Merle toisait le maître d’hôtel George Finnlunn.
“Je me disais aussi... Juste à vous observer, me suis dit ‘L’a du chien, ce type'... Et donc… Il est passé où votre chien, maître George ?”
Le “sous-fifre” irlandais balbutia :
“- Mais comment ? Mais quel chien ? Mais de quoi parlez-vous, inspecteur ?.
“- Lieutenant, s’il vous plaît, Finlunn, rappela l’officier Merle, sur le ton froid et ferme dont il usait toujours à dessein durant ses entretiens inquisiteurs."

Empoignant son calepin, pour faire comme si, l’agent Merle ajouta :
“- Un chien est mort ici, dans cette cave où nous sommes. Peu avant Mon Sieur le Gallois, décédé là-haut, au deuxième étage. Empoisonné pareil. Avec la même substance, je veux dire. Sauf qu’on a retrouvé du Sir William tout bien clamsé, ok; mais de chien, point ! Alors ? Alors, maître George… Il est où passé votre clébard ? Bien sûr que c’était le vôtre. Privilège oblige, chez… Comment dites-vous, déjà ? Chez ceux D’En-bas, c’est bien ça ?”
Le maître d’hôtel ressemblait à un bâton de glace à peine sorti de son étui. Figé !

Merle profita de l’instant pour abattre quelques cartes inquisitrices :
“- Ecoutez, mon vieux. Le rapport de la Scientifique l’établit formellement : un chien est mort empoisonné, au pied du baril à dégustation. Tué par le même poison qui a expédié le vieux lord ad patres. N’auriez-vous rien à dire à ce sujet, mon bon ami ?”
George Finlunn, se sachant obligé de le faire à l’encontre de la consigne qui l’avait assigné au silence, narra comment, ce soir-là, à la découverte du chien mort, il alerta le majordome de ‘monsieur’. Et comment, ce soir-là, monsieur et son majordome, descendus en cuisine, leur ont sitôt donné congé à lui et à la brigade du soir, assurant tout un chacun qu’ils ‘prenaient désormais les choses en main’.
“- Et donc, le chien ? insista l’agent Merle.
“- Aucune idée, inspec’... lieutenant, répondit maître George. Tout était propre le lendemain matin. Malgré... C’est là tout ce dont je puis assurément témoigner, monsieur.”
Robert Merle se curait un ongle en réfléchissant.
Nul doute, il fallait creuser plus profond. Ici et maintenant !
“Assurément…”
Puis, revenant à maître George, l’officier demanda :
“- Et donc, là, c’est l’ascenseur qui mène chez Ceux d’En-Haut, non ?
“- En effet, confirma le maître d’hôtel, un peu inquiet pour la seconde consigne qu’il devait observer.
“- Parfait ! Parfait, parfait, parfait, murmurait presque Robert Merle. Vous savez, quoi ? Je vous remercie, maître Kinlunn. Nous serons appelés à nous revoir, n’en doutez pas. Mais, d’ici là, puisque j’observe que l'ascenseur n’est accessible que par une clé, je vous prie de bien vouloir l’appeler pour moi. Maintenant…” 

Maître George devait s’opposer à cette commande.
“- C’est que… Voyez-vous ?... Je crains que ce ne soit impossible, bredouilla-t-il.
“- Ben, nan ! Justement : je veux voir. Faut-il que je vous remette mon badge sous le nez, Georgio Armani ?
“- Je suis bien conscient de votre qualité, monsieur, articula George Kinlunn en recouvrant certain aplomb qui lui valait son emploi. Mais sans commission rogatoire, je crains fort que vos prérogatives ne soient présentement caduques…”

Robert Merle s’étrangla secrètement.
“ Je vous merde, monsieur le procureur de la Raie-Qui-Pique !”
Le lieutenant enquêteur mit un mouchoir sur son opiniâtreté et capitula dans un soupir navré.
“Présentement, oui. Présentement… Voilà, voilà.”
Il jeta un dernier coup d'œil à la cage ouvragée Art-Déco de l‘ascenseur, tourna les talons et, à la suite de maître George, prit à rebours le chemin vers les cuisines et la sortie arrière du vieil hôtel haussmannien.
Avant de quitter les lieux, Robert Merle adressa un salut cordial aux membres du personnel, occupé à anticiper le coup de feu de midi. Il remercia maître George, plus chaleureusement que ce dernier ne s’y serait attendu.
L’enquêteur avait bien d’autres cartes à jouer. En prenant congé, il ne faisait que différer le temps où il reviendrait les abattre… 

Dans l’arrière-cour, tapi dans l’ombre du bâtiment grand bourgeois, un air automnal avait patiemment attendu le retour de Robert Merle, pour l’embrasser de sa bouche humide et froide.
Humide et froide comme la mort.

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--Au même endroit, mais au premier étage--
Ne sachant départir son trouble de son emphase, Sophro’ se rendit au premier étage de son propre hôtel. Il était seul à en avoir l’accès. Il en était bien le seul. Et il était seul. Tout seul. Avec ses pensées confuses.
Les portes de l’ascenseur s’ouvrirent. Pas encore son esprit.
Il fit un pas, puis un autre. Puis, un autre. Vers le seul endroit où il espérait trouver quelque réconfort. Non vers la droite, où se menaient les tractations. Mais sur la gauche... Bien sûr…
Sophronyme Grangier, dernier du nom, chargé du bien lourd héritage que lui avait légué sa chère mère, Ann’So, arpentait à présent le Couloir du Premier vers le seul endroit dont il avait l’absolue exclusivité.
Vers la chambre de sa mère.

Avant même d’entrer, le jeune homme en pressentit le parfum, la lumière, la musique du silence imparfait - jamais complet, bien que le lieu se tournât vers la cour. Pas sur le boulevard.
Après le décès de sa mère, survenu fin 2029, Sophronyme s'était secrètement interdit de venir jusque là. Lui qui, dans son enfance, n’y était venu qu’à trois notables reprises
A sa naissance - dont il n’avait, évidemment, aucun palpable souvenir.
A l'occasion d'une singulière - et unique ! partie de cache-cache, subitement initiée par Ce Cher Arivert'so (alors qu'ils n'avaient pas fini ses devoirs), dans le but (plutôt incongru) d'échapper alors à Charles Baumann, son père.
A la mort de ce dernier qui l’avait rendu plus léger, plus libre, plus sereinement prêt à vivre sa vie d’homme, quand il n’était encore qu’adolescent.

Enfin, Sophro se rendit, des mois durant, au chevet de sa mère, prise au ventre et aux poumons par un vilain crabe. Le crabe qui avait profité de l’affaiblissement d’Anne-Sophie, touchée par la pandémie de corona, en 2021, pour s'installer puis se répandre, lors de la recrudescence d'un variant du virus, en 2028.

Devant la porte de Sa Chambre, Sophro’ hésita, un instant.
Puis, sa main gauche engagea la clé dans le fermoir, tandis que la droite entrait le code sur le clavier. Le code validé, il tourna la clé dans la serrure. Le verrou succomba. Sophro’ n’avait plus d’autre choix, dès lors, que sauter à pieds joints ou s’enfuir. Entrer ou renoncer.

Quand il eut refermé la porte derrière lui, avant de parcourir le petit corridor qui le mènerait à l’espace intime de sa mère, Sophro’ prononça ces mots à voix basse : “Me voici, mère. M’entends-tu ? Je suis là. Toujours. Encore. Rendu à ce moment que tu souhaitais, si fort. Ici, à ton endroit, Ann’So.”

Sophronyme Grangier se tenait à présent devant la coiffeuse de sa mère. Ses bras encadrant le court plateau de noyer, la tête dans les épaules, menton replié, il souffla lentement avant d’inspirer en se redressant pour dire, au-delà de son reflet dans le miroir : “Alors ? On y va ?... On peut tous les abattre, désormais; tu sais. Le Real-Val est lancé. Et, pour le moment, tout se déroule ainsi que tu l’avais prévu, Ann’So.”

***

>à suivre<
___

[précédent]


Pour embrasser le fil du feuilleton.


tiniak ©2021 DUKOU ZUMIN &ditions TwalesK


pin_tiniak-draw1

Il s'agit là d'une nouvelle et fort émoustillante stimulation à produire du récit que nous propose AnnickSB, sur son Atelier en question(S)...

J'y réponds volontiers, car l'exercice, consiste à réaliser un feuilleton au fur et à mesure de questions (im)posées, prévalant, l'une après l'autre, à chacun des chapitres; cela me pousse à sortir de ma "zone de confort" (mes poLèmes) pour explorer davantage ma "prose à hics".
Je prends un plaisir fou à écrire ce feuilleton.
J'espère qu'il rencontrera votre plaisir de lire.

 

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  • Ma poLésie est une aporie animale et smirituelle que je vous offre de caresser, à l'impromptu. D'accord, j'ai la paronomase au bord de l'asyndète, mais je me soigne aux vers ! TANT QUE DURERA LA GUERRE !! ⓁⓄⓋⒺ ! ⓁⓄⓋⒺ ! ⓁⓄⓋⒺ !
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(manifeste poLétique

Poésie ! Poésie ! Tout naît en poLésie !

...le fleuve débitant sa musique immuable...

...le goûter qui mûrit au fond de mon cartable...

...le livre qui m'oublie et peuple mon chevet...

...la raison vacillant au détour d'un sonnet…

 

poLésie, mon pays, où n'est que poésie !

...la rue qui va son train vers l'Autre, à son endroit...

...la pierre de Caen nue, orangée par le soir...

...le balcon dégarni par un soudain hiver...

...au front de la mairie le trident délétère...

 

Poésie sans parti que d'être bonne amie

...me déflorant, tu m'aimes...

...et t'effeuillant, je sème...

...rien n'est plus indicible…

 

poLétiquement pris de fièvre inassouvie

...je te crie sur mon bras...

...tu t'écris sous mon pas...

...nous sommes l'Un Possible...

 

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