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2 janvier 2021

Episode 42 - Renoncements ?

Quarante-deuxième question posée par l'Atelier en question(s) :
"Préférez-vous le champagne ou le crémant ?" ;

Voyez plutôt... (allez ! vous avez bien cinq à dix minutes, chrono en main) 😎

 


Vintage stories : " Renoncements "


-- avril 1998, vol Airbus Ankara-Paris, Classe Affaires --
Anne-Sophie releva le nez de ses notes personnelles. Très personnelles… 

Elle avait dû se résoudre à mettre fin à sa relation avec son pétillant amant britannique, le commandant William E. Tolhurst. Elle en éprouvait un indéfectible trouble où se mêlaient le dépit, la résignation, un profond sentiment d’échec et une sorte de révolte rageuse qui serait peut-être son plus puissant moteur pour les mois, voire les années à venir.
Sous l’arrondi encore discret de son ventre, la forte femme nourrissait le fruit de cette passion adultérine. Un garçon.
“Ce ne sera pas pour déplaire à mon connard d’époux” songea-t-elle amèrement, prisonnière de son siège passager auquel elle eût préféré le confort d’un de ses jets privés, mais, mission humanitaire oblige, il lui fallait solder le billet de retour que lui valait son statut de principale administratrice d’un camp de réfugiés, laissé la veille, en bordure de la zone de survol démilitarisé, au nord de l’Irak.

S’astreindre à organiser, sur le papier, ses pensées pour le moins disparates, compte tenu de la tempête sentimentale qui l’assaillait depuis qu’elle se savait enceinte : voilà l’objet ! Son sujet ? Le chemin vers la résilience.
Et puis, un projet global, de transformation, qui prenait forme, aussi dans son intime giron... 

Puisqu’elle en était à rassembler les pensées positives qu’elle tirait de sa relation secrète, Anne-Sophie prit d’emblée le parti d’occulter ce qui relevait de l’intense rapport physique qui l’avait comblée durant ce temps suspendu, partagé avec cet homme singulier qu’est William Tolhurst. Pensez ! Un lord gallois, engagé dans les forces spéciales de Sa Majesté en qualité de commando d’élite - ce qui sous-tend d’innommables concessions faites à la brutalité - pour dire le moins… 

Toutefois, outre la douceur que l’amant avait su lui prodiguer, l’homme s’était avéré capable de déclamer de délicieux vers de poésie, de rire aux éclats quand l’humour touchait parfois à l’absurde et de nourrir, malgré toute son expérience du pire, une vision optimiste de l’humanité !

Voilà. Dans sa bulle, c’est tout ce dont Anne-Sophie voulait se rappeler, à présent.

… De leurs échanges espiègles en présence du gratin “huileux” qui visitait périodiquement Camp North, où elle pilotait la part française de l’ONG, tandis que son amant officiait au commandement des troupes britanniques détachées secrètement de la zone sud pour s’installer, depuis ‘96, à quelques centaines de mètres à l’est du camp de réfugiés, tout près de la frontière turco-irakienne.

… De leurs promenades silencieuses sur la rocaille dont seuls les mules et dromadaires pouvaient s’accommoder avec naturel.

… Des films qui les imprégnaient de leur mystère ou de leur fantaisie, de leur audace incongrue - “force aimant, disaient-ils, dans cette langue que les amants s’inventent pour eux seuls”; de leurs lectures favorites; de leurs récitations, qu’elles fussent enflammées ou humblement murmurées… 

… De leurs vues partisanes sur l’état du monde.
Partisanes d’un radical changement de modèle qui relèguerait le capitalisme outrancier au rang de sombre période, de terrible et cynique erreur de parcours dans l’histoire humaine. Dans un premier temps, il s’agirait d’en démontrer l’iniquité (“l’Inquisition !”). Puis il faudra opposer et installer un projet durable, validé par les peuples comme par les gouvernants, les acteurs industriels et ceux de la société civile. Tous azimuts confondus dans une ligne consentie, aussi librement que possible, parce qu’elle se devra équitable, soucieuse du bien-être de toute forme de vie sur la planète et respectueuse de toute forme de pensée à l’exception des plus immondes, des plus rétrogrades, des plus totalitaires.
Un modèle de démocratie planétaire, rien moins.

“- Bien… D’accord, Hermeline chérie, lui avait répliqué William (qui aime tant la nommer par son deuxième prénom, si vieillot qu’il soit ! et sans doute pour cette seule raison, d'ailleurs). Mais notre vision n’est-elle pas tout autant totalitaire ?
“- Teu, teu, teu ! lui opposa Anne-Sophie (pour l’allitération ?) enroulant les pilosités grisonnantes du poitrail de son amant entre la finesse de ses doigts. Notre vision est ‘globalitaire’, mon cher. Nuance d’importance, n’est-ce pas ?
“- Décidément, ricana Will (ainsi qu’elle aimait à l’appeler, dans leur vorace intimité; mais pour l’agacer un peu, quand même !), tu as réponse à tout. Ta rhétorique est donc à ce point peaufinée ?... Sans rire, hein ? s’enquit-il encore.
“- C’est qu’il va me falloir en user aussi bien avec les Grasses-Têtes du ‘Beau-Monde’ qu’avec le maigre Quidam. Ils ne manqueront pas de m’opposer la pire forme du fatalisme : le doute envers ce qui leur est inhabituel, donc étrange. Pour ne pas dire : étranger. L’étrangeté ! Principale source d’inertie des peuples acculturés, et fertile terreau des systèmes archi-conservateurs pour les tenir en esclavage.
“- Tu m’as pourtant assuré ne pas aimer porter le rouge ailleurs que sur tes lèvres, non ? ironisa alors l’officier défait, pour un temps, de son emploi meurtrier.”
Une étincelle lubrique accentua soudain l’acuité, déjà vive, du vert regard d’Anne-Sophie.
“- Je vois, annonça-t-elle, grivoise. Monsieur souhaite sans doute que je lui en apporte la preuve ?”

“Oui, mais non !” se fustigeait intérieurement la capitaine d’industrie dans l’avion qui la ramenait à ses affaires parisiennes.
Prenant d’abord une profonde aspiration avant d’expirer lentement, Anne-Sophie Grangier s’employa à révoquer les liens philosophiques, culturels  et spirituels qui l’avaient convaincue alors, que le commandant William Edern Tolhurst était… - est ?... était… l’homme de sa vie.
Outre sa formidable habileté pour… 
“Oui, mais non ! Non ! Non ! Non !”

Le vol, ponctué de quelque trois escales européennes, s’annonçait long à subir. Aussi Anne-Sophie accueillit-elle avec bonheur la proposition que lui faisait le stewart, chargé de bichonner la riche industrielle :
“- Madame, quel choix aurait votre préférence : champagne ou crémant ?
Cette question !

pol22_Ann'So-BOTH!

-- Même nuit, même vol; deux étages en-dessous --
Le jeune Arivetso Zafi Andriamisaina faisait mine de s’intéresser au coloriage que ses parents lui avaient refourgué à la hâte - mais avec une attention sincère pour son bien-être durant leur vol de retour vers Paris.

En réalité, l’entier de son esprit était porté vers sa chère maîtresse, assise en Classe Affaires.
“Comme elle doit être malheureuse, se dit le jeune garçon encore impubère, pensant à sa chère maîtresse avec empathie. Mais… Je le savais, le british lui aura tourné le dos, sitôt qu’elle lui aura annoncé sa proche maternité.”
Arivertso s’énerva sur son dessin.
“- Tout va bien, mon chéri ? s’inquiéta sa mère, assise à sa droite.
“- Ben… Ce sera moins facile que je ne le pensais, lui répondit le garçon, à la fois pour rassurer sa mère et pour résumer, fulminante, sa pensée.”
Selon son habitude, quand quelque chose le tracassait, Arivetso forma une bulle de salive entre ses lèvres ourlées, aussi longtemps que possible, avant que “pop!”, elle n’éclate dans sa bouche.

***

>la suite<
___

[précédent]


Pour embrasser tout le fil du feuilleton.


tiniak ©2022 DUKOU ZUMIN &ditions TwalesK


Le feuilleton développe à présent sa DEUXIÈME PARTIE
Intitulée 
"vintage stories", elle opère un retour sur les motivations des personnages, principalement autour de celles qui conduiront Anne-Sophie Grangier, mère du personnage central, à convaincre Sophronyme de renverser le modèle mondial dominant. 

Le principe de publication demeure le même; il répond aux questions hebdomadaires posées par l'Atelier en question(s), proposé par AnnickSB (que je ne remercierai jamais assez pour cette intiative).

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Commentaires
M
" ...renverser le programme mondial" ! J'ai hâte de lire la suite !
Répondre
Z
Belle page de lecture ce matin, merci !<br /> <br /> Bises et bon mercredi - Zaza
Répondre
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  • Ma poLésie est une aporie animale et smirituelle que je vous offre de caresser, à l'impromptu. D'accord, j'ai la paronomase au bord de l'asyndète, mais je me soigne aux vers ! TANT QUE DURERA LA GUERRE !! ⓁⓄⓋⒺ ! ⓁⓄⓋⒺ ! ⓁⓄⓋⒺ !
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(manifeste poLétique

Poésie ! Poésie ! Tout naît en poLésie !

...le fleuve débitant sa musique immuable...

...le goûter qui mûrit au fond de mon cartable...

...le livre qui m'oublie et peuple mon chevet...

...la raison vacillant au détour d'un sonnet…

 

poLésie, mon pays, où n'est que poésie !

...la rue qui va son train vers l'Autre, à son endroit...

...la pierre de Caen nue, orangée par le soir...

...le balcon dégarni par un soudain hiver...

...au front de la mairie le trident délétère...

 

Poésie sans parti que d'être bonne amie

...me déflorant, tu m'aimes...

...et t'effeuillant, je sème...

...rien n'est plus indicible…

 

poLétiquement pris de fièvre inassouvie

...je te crie sur mon bras...

...tu t'écris sous mon pas...

...nous sommes l'Un Possible...

 

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