Episode 11 - Episode hic !
Livré en avant-première, pour satisfaire à l'atelier Une photo, quelques mots, voici désormais l'intégralité de l'épisode répondant à la question n°11, posée par AnnickSB, sur son Atelier en question(S)... : "Vous pensez à quoi ?"... Voyez plutôt...
Episode 11 - Episode hic !
--Paris, commissariat du IIème arr.--
Le lieutenant Robert Merle s’installa à son bureau pour éplucher le dossier d’enquête que venait de lui confier son chef. Une heure plus tard, il organisait son carnet de notes afin d’engager sans tarder sa tournée de recueil de témoignages.
Davantage que d’autres, un élément, issu de ce rapport de la Scientifique qu’il avait gardé en main, l’intriguait : de la bave de chien séchée avait été relevée au pied d’un baril consacré à la dégustation des précieux spiritueux conservés dans un recoin de la cave à vin de l’hôtel Grangier. Le même poison qui aura entraîné la mort de Sir William y avait laissé des traces plus que tangibles.
“Bon pour le Proc’, ça. Autant commencer par là” se dit l’enquêteur.
Ensuite, il remarqua que le personnel de maison chargé de l’entretien des étages avait reçu congé dans l’après-midi précédant le meurtre. Tandis que les membres du personnel de cuisine avaient été priés de rester jusqu’à la composition du repas du soir, après quoi, la même mesure de congé exceptionnel s’appliquait à eux. Elle leur avait été signifiée par… “un certain maître George, ok” nota Merle. “George, sans ‘s’... Et, allez ! Un british, vraisemblablement” précisa-t-il sur son carnet. A quoi il ajouta, après vérification de l’organigramme du personnel employé à l’hôtel Grangier, la qualité de maître d’hôtel responsable des embauches, sous le nom de Mr. George Kinlunn. “Irish, ay? Autant pour moi…” fit mine de se fustiger intérieurement l’officier placide, quoique volontiers bougon.
Dans son cerveau à l’affût, Merle imprima deux questions liées l’une à l’autre : “Où est le chien mort ?” et “Pourquoi un congé exceptionnel ?”
“- Vous pensez à quoi, Robert ? lui demanda la voix du commissaire Varlotta, dans son dos.
“- A rien chef, répondit Merle sans se retourner. Je remettais de l’ordre dans mes interrogations avant d’y aller.”
L’absence de commentaire lui signifia que Varlotta était déjà parti vaquer ailleurs.
Levant le nez de son carnet, l’officier Merle vit le major Ben Lemna ramasser prestement quelques affaires de sur son bureau (y compris l’ordi micro dont elle ne se séparait jamais, pas même lors de leurs patrouilles en duo). Malgré cet empressement, sa coéquipière lui adressa un salut enjoué, pouce levé.
“Zounia, toi, tu vas encore aller fourrager en eaux troubles, hein ?” répliqua silencieusement le lieutenant, imitant du geste l’oscillement d’un poisson. Sa collègue lui sourit en retour, clin d'œil complice à l’appui, avant de vider les lieux d’un pas décidé.
--Quelque part à Londres--
“- Eh bien, mes chers amis, il me semble que nous sommes d’accord. Le monde libre, dont il nous appartient de préserver l’équilibre autant que l’ordre, nous intime d’agir selon nos convictions. Je vous invite donc à faire valoir partout votre influence, de sorte que rien ne vienne plus - jamais ! remettre en cause les fondements de notre unité, à savoir nos juteux intérêts. Vous êtes pleinement maîtres de vos agissements, chers amis, ce qui constitue notre privilège suprême, chacun depuis son domaine. Aussi n’ai-je nul besoin de vous indiquer par le menu comment parvenir à nos fins. Et, sur ces mots de conclusion, je me dois de souligner à quel point je me réjouis du sang-froid dont vous avez fait preuve pour ne vous être pas laissés berner par le petit con de l’autre grande folle. A dieu vat !
“- A dieu vat !” reprit en chœur l’assemblée restreinte, avec une sincérité partagée par chacun de ses membres, à l’exception d’un seul.
--Paris, gare Saint Lazare--
“- Knock! Knock!...
“- Who’s tha’?
“- Toby...
“- Toby who?
“- Toby Involved! Woohoo!”
Un gargouillement parasite, parfaitement connu d’elle, s’invita dans les écouteurs de Zounia Ben Lemna.
“- C’est bon, ma grande, tu peux parler” lui dit une voix familière encore, après tant d’années de relatif silence. Familière pour toujours...
“- Suis en mouvement vers la Coulée Verte. Il faut vraiment qu’on se voit, Dee. J’ai une patate chaude dans les mains, là. Je suis sûre que tu le sais déjà. Forcé, après mes dernières recherches sur le (p)ark. C’est du concret qu’il me faut, tu piges ?
“- Un peu, oui ! Car t’es passée De l’Autre Côté, ma belle.. Tu piges ? Alors bon, pour sûr, il te faut de la matière pour la Jud’. J’en ai, t’inquiète. Je m’attendais à ton appel.
“- T’en as !?! Putain, Dee, t’es le meilleur !
“- Ben… T’as pas toujours dit ça, hein ?
“- Commence pas, Dee. Tu sais qui je suis… mon histoire… Tu n’y peux rien, là, ok ? Tu le sais, wak !
“- Ouais, ouais. Je le sais… Mais Qui ne dresse pas sa tente sur le canal…
“- … St Martin mangera son chien, au final… T’es con !
“- Moi aussi, je t’aime.
“- Arrête…” dit Zounia dans un soupir.
L’agente Ben Lemna - mais pas que... regarda autour d’elle. R-A-S, a priori. Juste un type qui passa un peu trop près d’elle, à son goût.
--Hôtel Grangier, Les Grands Boulevards, Paris II--
Robert Merle se présenta à l’entrée de l’office situé à l’arrière de l’hôtel Grangier.
“- Que puis-je pour vous ?” s’enquit un petit homme en livrée clairement (...“nan, ridiculement !”...) passéiste, encadré par la porte donnant accès aux communs D’en-Bas (“comme une photo… mortuaire ?”).
L’officier Merle, agent de la brigade criminelle dirigée par l’inspecteur-chef - et néanmoins commissaire, Henri Varlotta, sous prétexte d’étoffer son rapport par obligation protocolaire, fit comprendre à l’employé rouquin - et néanmoins maître d’hôtel, George Finlunn (”Toi, t’es Irish, pour sûr ! Autant pour moi”) qu’il avait besoin de visiter la cave à nouveau.
“- Mais très certainement, monsieur l'inspecteur” l’assura l’obséquieux (“moi, c'est lieutenant; sous-fifre !”) employé.
--Commissariat du IIème arr.--
“- Et voilà, souffla d’une voix lasse, Henri Varlotta, attendant un coup de fil. Les affaires reprennent...”
Mais voilà, dans la solitude de son bureau désert - exception faite de lui-même et de ses pensées tout azimut, le commissaire s’inquiétait. Il le savait bien : dans le milieu auquel ils avaient affaire, la résolution ultime sera, non seulement aussi tarabustée qu’avec le grand banditisme, mais autrement plus compliquée par le seul fait qu’elle semblait relever - non ! il en était certain ! qu’elle relevait d’enjeux carnassiers, mûs par des siècles de suprématie sur le monde. Celle d’un Homme si avide de pouvoir qu’il n’imprimait plus sa majuscule que sur son oreiller ou la pochette de son blazer.
--Parvis de la gare St Lazare--
Zounia se demanda soudain ce qu’il lui arrivait. Ses jambes se dérobaient sous elle. Son casque lui tombait des mains. Son micro, pesant à son épaule, semblait l’entraîner vers le sol. Sa vision se troublait.
Il faisait nuit, déjà ?
Quelqu’un lui prenait le bras ?
Une voix murmura :
“- Vous ne vous sentez pas bien, mademoiselle. Laissez-moi vous aider.”
On la guidait. Le major Zounia Ben Lemna se laissait faire ?
Pourtant, de loin, très loin, dans son for intérieur, la voix de Zounia hurlait : “mais nooooon !”
***
>à suivre<
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tiniak ©2021 DUKOU ZUMIN &ditions TwalesK
Il s'agit là d'une nouvelle et fort émoustillante stimulation à produire du récit que nous propose AnnickSB, sur son Atelier en question(S)...
J'y réponds volontiers, car l'exercice, consiste à réaliser un feuilleton au fur et à mesure de questions (im)posées, prévalant, l'une après l'autre, à chacun des chapitres; cela me pousse à sortir de ma "zone de confort" (mes poLèmes) pour explorer davantage ma "prose à hics".
Je prends un plaisir fou à écrire ce feuilleton.
J'espère qu'il rencontrera votre plaisir de lire.