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10 janvier 2021

Episode 10 - tabula dixit

Dixième question : "Qu'avez-vous décidé ?" 
Voyez plutôt... et retrouvez les autres contributions à l'atelier FEUILLETON proposé par AnnickSB, PAR ICI !


Episode 10 - tabula dixit

A la claire fontaine, t’envoyant promener, 
j’y ai trouvé plus belle et je l’ai bien baisée !

“- Oh purée, Art’so ! soupira Sophronyme Grangier à l’endroit de son majordome malgache qui fredonnait ainsi, le nez collé à la vitre d’une des fenêtres de la chambre. T’en finiras donc jamais de massacrer ainsi nos vieilles comptines ?
Le Malgache, impassible, ne prit même pas la peine de hausser les épaules. Il avait déjà expliqué à son jeune patron que, dans sa culture ultramarine, on ne s’embarrassait pas de tournures alambiquées pour inculquer aux enfants, par le chant, les interdits fondamentaux sans lesquels l’espèce humaine, parce qu’animale, ne se distinguerait en rien des autres formes de vie animale et, pire encore, si elle n’y prenait garde, serait vouée à disparaître. Bien au contraire, Arivetso Zafi Andriamisaina (“Celui Qui Inspire Par L’Intelligence de L’Ancien”) persévéra dans sa translation iconoclaste.

Tino Rossignol chante, toi qui a le cœur gay...

“- Ah ouais, mais non, Art’so, s’exaspérait Sophro’ accroupi sur son lit. Tu abuses, là. Avoue que ça n’a plus rien à voir avec une lecture psychanalytique du texte médiéval. Je veux bien qu’à l’époque on assassinait, violait, pillait, commettait l’inceste ou trucidait ses parents, sans vergogne quasi, mais Tino Rossi ne faisait certainement pas partie de leur top-hits, quoi !”
Sans se retourner, mais lissant la mouche sous sa lèvre, Arivetso Zafi Andriamisaina adressa un sourire à son reflet dans la vitre.

En fait, le serviteur - très très particulier, du dernier des Grangier, se félicitait intérieurement de ce que la mort subite de Sir William, incidemment survenue dans l’hôtel parisien de la famille, allait précipiter l’accomplissement du projet d’envergure planétaire dont il était déjà partie prenante, bien avant que Sophro’ s’en fût investi. Par pure et entière fidélité envers la meilleure part d’Ann’So qu’il lui ait été donné de connaître, bien avant que Sophro’ ne fût même conçu, lui, Ce Cher Art’so, se consacrait corps et âme à sa réalisation. Par amour, en retour, lui, Arivetso Zafi Andriamisaina veillait à l’accomplissement de ce projet visionnaire, tant sur le plan de l’économie, de l’écologie, que de la  nouvelle forme de gouvernance mondiale sous-tendue par ses orientations. Une gouvernance mûe par une philosophie imparable, qui constituera sa pierre d’achoppement. Imparable, car fort justement pragmatique, (“Justement !”) puisque salutaire...

“- Ouais, bon, soupira Sophro’ de nouveau, mais sur un ton plus neutre. T’as vu que nous sommes convoqués demain, toi et moi, au commissariat du IIème ? Et donc… On leur parle du chien ou pas ?”
Art’so tourna le dos au rideau de la fenêtre... à ses pensées, pas tout à fait.
“- Bien sûr que non. J’ai verrouillé le fait avec tous les membres du personnel encore présents, ce soir-là.
“- Ok… D’accord… Mais attends… Ce n’est pas par un effet du hasard que l’on a retrouvé le chien de maître George empoisonné au pied du baril de dégustation, dans la cave. ‘Précisément ce soir-là’, comme dirait Varlotta… Et ça, peu avant que, revenus à l’étage, toi et moi, nous ne découvrions Sir William agonisant sur le tapis de mon salon, bordel ! Tué par le même poison, vraisemblablement. Inséré dans ma carafe !
“- J’ai verrouillé, te dis-je, affirma Art’so.
“- Verrouillé ? Mon cul ! explosa Sophro’. T’en fais quoi de la petite qui s’est barrée des chambrées deux jours avant ? Hein ?
“- Ben, elle est morte.
“- Hein ? Quoi ? Quand ? Comment ? s’enfiévra Sophro’.
“- Quand, ça, je le sais : le soir-même de sa démission. J'ai fait le nécessaire, sitôt que je l’ai appris, des mots mêmes de sa mère qui m’a chargé, par moult invectives, d’être responsable de la mort de sa fille.
“- Et donc !?!”
Arivetso marqua un temps d’arrêt pour répondre avec calme à ce semblant de suspicion dans la bouche de son cher Sophro’.
“- Ecoute... Je me suis renseigné. Dans son entourage, on parle d’un suicide, expliqua tranquillement Art’so. La petite, promise à un mariage arrangé, était enceinte de quelques mois. Qui plus est : le jour de son départ, notre maître George, lui était tombé dessus, au sujet d’une crème - ta préférée, qu’elle aurait mal fouettée. Peut-être la goutte qui aura fait déborder le vase. J'ai donc fait le nécessaire : assuré la mère de ce que nous étions tous navrés et surpris; et puis j'ai versé un dédommagement à la famille pour nous garantir leur discrétion au sujet de ce décès fort regrettable, dont nous étions tous peinés.

Cela commençait à faire beaucoup, pour Sophro’. Beaucoup trop, même !
Oui, beaucoup trop de mort autour de son projet de vie.

Mort de son père, quand il était encore enfant. Mort de sa mère, il y aura bientôt un an. Mort du chien de maître George, découvert empoisonné et gisant dans la cave, peu avant la mort par empoisonnement, là aussi, de Sir William, déboulé, comme à l’improviste, à son hôtel parisien, ‘précisément ce soir-là’. Ce soir où, lui, Sophronyme Grangier, espérait déjouer une manœuvre destinée à mettre à mal son projet disruptif d’avec le modèle ultra capitaliste dominant, mais par trop morbide et déjà déliquescent. Projet hérité de sa mère et dont il se sentit pleinement dépositaire, sitôt qu’il eut pris connaissance de la lettre qu’Ann’So avait jointe à son testament, mais destinée à lui seul. Et, maintenant, mort suicidaire d’une de ses femmes de chambre dont il devait bien reconnaître ne se souvenir que très vaguement de son visage. Et ça, deux jours avant le drame qui lui valait aujourd’hui de devoir subir les investigations policières d’un foutu commissaire aussi sagace que tenace...
“- Et merde !” jura l’héritier des Grangier, se laissant tomber à plat dos sur sa vaste couche.

***

Au commissariat du IIème arrondissement parisien, le commissaire Henri Varlotta observait, depuis la vitre de son bureau, son équipe d’enquêteurs et d’enquêtrices s’affairant dans l’open-space qui leur était réservé.
Ils travaillaient tous vite et bien. Sans précipitation mais efficacement. Leurs rapports se succédaient sur son bureau. Varlotta, au fur et à mesure de leur arrivée, affinait sa stratégie. Car, pour le lendemain, il avait lancé une série de convocations des témoins et acteurs concernés par le meurtre de Sir William E. Tolhurst, commis, de façon plutôt incongrue, à l’hôtel de la famille Grangier.

Alimentée par les derniers éléments rapportés par le major Zounia Ben Lemna, l’enquête avait avancé assez significativement. De sérieuses pistes étaient désormais envisageables qui motivaient de nouvelles auditions. Notamment celles du fils Grangier et de son majordome malgache, bien sûr. Ce dont il se chargerait lui-même, à l’évidence. Mais, en vieux renard qu’il était, Henri Varlotta comptait bien élargir l’éventail de ses investigations à d’autres acteurs, plus ou moins directs, de ce drame à résonances multiples.

Cela faisait déjà bientôt soixante-douze heures que l’équipe de la criminelle, placée sous son commandement direct, consacrait tous ses efforts à cette enquête, laissant d’autres affaires en souffrance, pour un temps. Un temps qui n’était pas élastique, Varlotta en avait bien conscience. Il fallait passer à la vitesse supérieure et obtenir des résultats probants dans les meilleurs délais. Quarante-huit heures encore. Pas plus. Au-delà, il faudrait scinder l’équipe pour reprendre les autres dossiers en cours.

Le major Ben Lemna et le lieutenant Merle se présentèrent à lui ainsi qu’il le leur avait demandé, à dix heures zéro-zéro.
“- Qu’avez-vous décidé patron ?” demanda l’officier Merle, après les quelques brèves salutations à leur chef auxquelles lui et sa coéquipière s’étaient livrés.
Varlotta leur remit à chacun un guide d’investigation, préparé par ses soins, afin de mener les entretiens qu’il leur confiait, dès à présent, pour un compte-rendu attendu le lendemain dans la soirée.
Cette injonction de résultat faite, Varlotta conclut ses commandements en ces termes :
“- A vous donc, major, la charge d’affiner les données que vous avez brillamment recueillies concernant la relation de madame Grangier avec Sir William. Je compte sur la qualité de toutes vos ressources, mais il me faut des renseignements recevables pour le Proc’. On est bien d’accord ?
“- Haut et clair, chef ! obtempéra l’agente Ben Lemna avec un enthousiasme exagéré qui, cependant, ne démentait ni son sérieux ni sa détermination.”
Varlotta se tourna alors vers son enquêteur favori. Avant même qu’il n’ait à énoncer d’autres consignes, le lieutenant s’empressa de déclarer :
“- Et à moi de faire le tour du personnel de maison, des relations professionnelles du fils Grangier et de tout autre témoignage périphérique permettant d’affiner les éléments circonstanciels dont nous disposons déjà. C’est entendu, chef.”

Les deux agents saluèrent leur supérieur et quittèrent son bureau.
Varlotta cala ses mains de part et d’autre des rapports remis par son équipe.
“Et à moi de tirer quelques ficelles sensibles parmi les relations dont je dispose, auprès du ministère de la Défense, notamment…” soupira-t-il.

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***
>à suivre<
___

[précédent]


NB : par souci de lisibilité de ma poLétique chérie,
je détermine arbitrairement la date de parution de chaque chapitre.

Reportez-vous donc aux liens [précédent] et >à suivre<
ou celui-ci pour embrasser le fil du feuilleton.


tiniak ©2021 DUKOU ZUMIN &ditions TwalesK


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Il s'agit là d'une nouvelle et fort émoustillante stimulation à produire du récit que nous propose AnnickSB, sur son Atelier en question(S)...

J'y réponds volontiers, car l'exercice, consiste à réaliser un feuilleton au fur et à mesure de questions (im)posées, prévalant, l'une après l'autre, à chacun des chapitres; cela me pousse à sortir de ma "zone de confort" (mes poLèmes) pour explorer davantage ma "prose à hics".
Je prends un plaisir fou à écrire ce feuilleton.
J'espère qu'il rencontrera votre plaisir de lire.

 

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Commentaires
T
Hé ! Hé ! Vous avez raison l'une et l'autre, Adrienne et Ann'Maï : côté intrigue, il va y avoir du sport, aussi bien pour le tandem Sophro'/Art'so que pour le duo Merle/Ben Lemna.<br /> <br /> Et puis... un nouveau personnage ne va pas tarder à faire son entrée - que j'ai déjà présenté en avant-première, ici : Agathange Lignac, femme de chambre.<br /> <br /> http://niak65poletique.canalblog.com/archives/2021/03/04/38847943.html
Répondre
A
Primo, j'adore les interprétations, disons "coquines" d'Art'So de nos tendres comptines ! Un instant d'humour dans une sombre histoire de meurtre !<br /> <br /> Deuzio, oui, ça commence à faire beaucoup de cadavres autour de Sophro, et le moindre n'est pas celui de la femme de chambre dont la mort me semble advenue très opportunément !<br /> <br /> Je dirais que ça se corse cher ami ! Et que notre équipe de choc d'enquêteurs, n'a pas fini d'en découdre avec cette drôle d'affaire !
Répondre
A
mince! jamais une bonne idée d'essayer de cacher un "meurtre suicidaire" aux enquêteurs, ça va leur tomber dessus au mauvais moment, cette histoire ;-)<br /> <br /> (donc tu as aussi tes fiches sur Madagascar? mince! mince!)
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  • Ma poLésie est une aporie animale et smirituelle que je vous offre de caresser, à l'impromptu. D'accord, j'ai la paronomase au bord de l'asyndète, mais je me soigne aux vers ! TANT QUE DURERA LA GUERRE !! ⓁⓄⓋⒺ ! ⓁⓄⓋⒺ ! ⓁⓄⓋⒺ !
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(manifeste poLétique

Poésie ! Poésie ! Tout naît en poLésie !

...le fleuve débitant sa musique immuable...

...le goûter qui mûrit au fond de mon cartable...

...le livre qui m'oublie et peuple mon chevet...

...la raison vacillant au détour d'un sonnet…

 

poLésie, mon pays, où n'est que poésie !

...la rue qui va son train vers l'Autre, à son endroit...

...la pierre de Caen nue, orangée par le soir...

...le balcon dégarni par un soudain hiver...

...au front de la mairie le trident délétère...

 

Poésie sans parti que d'être bonne amie

...me déflorant, tu m'aimes...

...et t'effeuillant, je sème...

...rien n'est plus indicible…

 

poLétiquement pris de fièvre inassouvie

...je te crie sur mon bras...

...tu t'écris sous mon pas...

...nous sommes l'Un Possible...

 

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