Episode 1 - L’heure à tuer
Il s'agit là d'une nouvelle et fort émoustillante stimulation à produire du récit que nous propose AnnickSB, sur son Atelier en question(S)...
J'y réponds volontiers, car l'exercice consiste à réaliser un feuilleton au fur et à mesure de questions (im)posées, prévalant, l'une après l'autre, à chacun de ses chapitres; cela me pousse à sortir de ma "zone de confort" (mes poLèmes) pour explorer davantage ma "prose à hics".
Je prends un plaisir fou à écrire ce feuilleton.
Je souhaite donc qu'il rencontre aussi votre plaisir de lire.
Première question : "Qui va venir au rendez-vous ?"
Voyez plutôt... et retrouvez les autres contributions PAR ICI !
PREMIERE PARTIE
Episode 1 - L'heure à tuer
Sophronyme tournait et retournait la liste dans sa tête depuis des lustres, lui semblait-il. En réalité, une demi-heure à peine s’était écoulée, une fois le combiné finalement raccroché sur son socle (avec ce petit cling ! caractéristique d’un siècle désormais révolu pour beaucoup). Le bout de son index gauche était demeuré là, tout ce temps, mollement prisonnier du chiffre 7 (lettré P-R-S, sur le cadran rotatif en laiton nickelé, typique du modèle administratif datant de l’Entre-Deux-Guerres). Sophronyme ressassait son idée, la confrontant incessamment à son intention première : découvrir le fin mot de l’histoire et confondre la personne qui en avait été l’instigatrice… fâcheuse !
Un peu plus d’une heure encore et ils devraient être fixés. Lui et le Bon Arivetso.
Restait à savoir qui, de la demi-douzaine de personnes qu’il avait aiguillonnées, se rendrait finalement à son piégeux "rendez-vous" ?
Depuis le boulevard filant en contrebas de l’immeuble haussmannien hérité de sa mère, Sophronyme percevait vaguement le bourdonnement croissant, en grande partie animé par les sorties de bureau et celles des établissements scolaires, ainsi que les dernières ruées vers les commerces de proximité. Par le fin entrebâillement d'une des six fenêtres du salon maternel, se mêlaient aussi le martèlement des trottoirs par des foulées pressées de regagner leurs pénates, les harangues de quelques vendeurs à la sauvette et le ronron poussif des rares moteurs à essence ou diesel qui “circulaient” encore, quand la généralisation du tout électrique et de la combustion hydrogène avait depuis longtemps gagné la quasi totalité du parc des véhicules, citadins et autres... L’heure était aux bouchons.
Ramenant sa main gauche sous son menton rasé de frais, Sophronyme, confortablement installé dans le fauteuil cossu de sa mère défunte, reprit par le menu le détail de sa liste. Liste resserrée, après quelques semaines d’enquête interne menée par lui-même, secondé par l’indispensable et fidèle Arivetso, dévoué au service et aux intérêts de la famille comme le furent en leurs temps son père et sa mère, ses grands-parents, tous Malgaches. Liste ramenée, donc, aux dernières hypothèses probables : celles qui avaient pu motiver un- ou une-telle à commettre ce manquement intolérable aux valeurs fondatrices de l’entreprise familiale. Voire plus largement, le déplorait Sophronyme, dérogeant au simple respect, de pur bon sens, dû à la citoyenneté, la plus libérale qu'il soit possible.
Fort opportunément, “Le Bon Arivetso” pointa son court nez évasé, bronzé de l’intérieur (persistant atavisme de ses origines ultramarines), par l'ouverture de la lourde porte renforcée de plomb, lui-même couvert de cuirs épais rivetés au cuivre.
“- Tout est fin prêt, monsieur. Souhaitez-vous que je vous tienne compagnie avant l’arrivée de votre “invité(e)” ? s’enquit l’aimable serviteur - et néanmoins confident, auprès de son employeur. Martine et George sont occupés en cuisine et j’ai donné congé à Bertrand qui ne s’est pas fait prier pour retrouver sa femme et leur petit dernier, poursuivit le Malgache avec un regard de connivence.”
“- Merci, répondit Sophronyme. Merci pour tout, Art’so. Et oui, je veux bien que tu restes un peu, ici encore; j’ai l’impression que je vais imploser avec tout ce que je rumine.”
L’homme de maison franchit alors la porte, chargé d’un plateau où cliquetaient et miroitaient de la faïence, du cristal, et quelques amuse-gueules qui seront bienvenus pour accommoder, qui un chocolat chaud, qui un verre d’alcool.
Déposant le tout sur le bureau comme s’il se fût agi du sien, Arivetso prit place en face de son patron et, d’un geste balayant le contenu du plateau de part en part, il s’apprêtait à servir selon le désir de son cher Sophro’.
“- Par contre, on est d’accord, prévint ce dernier; ça sonne, tu décampes et je descends ouvrir moi-même.”
Arivetso, affichant un air à la fois surpris et un rien contrarié, répliqua d’un ton qui ne parvint pas à masquer quelque inquiétude :
"- Vous-même, finalement; vous... Tu crois ?”
Sophronyme hocha la tête avec résolution.
Arivetso, le bien-nommé, “celui qui inspire…” confiance, n’en pensait pas moins, mais ne broncha pas. Il en serait donc ainsi.
***
NB : par souci de lisibilité de ma poLétique chérie,
je détermine arbitrairement la date de parution de chaque chapitre.
Reportez-vous donc aux liens [précédent] et (à suivre)
ou celui-ci pour embrasser le fil du feuilleton.
tiniak ©2021 DUKOU ZUMIN &ditions TwalesK
<< retour migratoire pour les 'blogspot.com' <<